Trente-sept
à Irek Mourtazin
Nul ne peut ignorer le temps ni l’histoire
Qui jamais ne recommence à l’endroit
Mais qui louvoie souvent entre le rire et la folie
Les crimes se répètent rarement
Dans la constellation des corrompus
Dire la vérité se paie au comptant
Et aujourd’hui dans le bruit l’on n’est guère entendu
C’est encore plus vrai pour les poètes fragiles
Qui jurent ce qu’ils écrivent
Et leurs vers sont leurs veines
Et les mots leur sang qui les irrigue
Disparu Mandelstam et les rivages poétiques
Les déportés ne connaissent pas l’origine ni la raison de leurs crimes
Ne savent jamais le pourquoi du rendez-vous avec le camp
Mais veille le critique d’état apparenté à la police des lettres
Pasternaken a pris la mesure au fil de ses pages
Et Boulgakov réclame même le droit de se taire
Pour toujours dans l’ailleurs privilège refusé d’un non central
Les poètes sont toujours dangereux dans la valse des comiques
Aujourd’hui en France on préfère oublier Choderlos de Laclos
Et l’on condamne la Princesse de Clèves au repos éternel
Dans le complot du silence et de l’ignorance
Qui seule plaît aux prélats
Par ici Boulgakov revit par dizaine de fois
Et le choix est précis
Ou se taire ou faire semblant
C’est le prix à payer de dire
C’est le destin des poètes qui refusent les chimères
Varlam Chalamov a retenu la leçon pour survivre
Pour ensuite tout dire et écrire
Tout dire et écrire
Pour élever la vérité au rang de la raison
Pour élever la raison au niveau du sang
Le 30 décembre 2008
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